Chronique de Malorie57
Toute ma gratitude au forum Accros & Mordus ainsi qu’aux Editions Phébus, pour m’avoir fait confiance pour ce partenariat. Passablement différent de mes lectures habituelles, Muse, de Joseph O’Connor m’a tout de suite interpellée. Une histoire d’amour peu conventionnelle que je me devais de lire. Une découverte bouleversante que je ne suis pas prête d’oublier.
Une histoire d’amour à la saveur doucereuse, mais au relent amer, où l’espoir et le désespoir se mêlent avec mélancolie, digne d’une pièce de théâtre, mais dans laquelle la comédienne joue le rôle de sa propre vie.
Difficile pour moi d’exprimer par de simples mots en quoi cette lecture m’a tant touchée. Cela vient peut être du fait que Miss Allgood et John Millington Synge aient réellement existé, que ce ne soient pas de simples personnages fictifs, ou alors c'est cet amour impossible qui m’a tant bouleversée. Bien sûr, Joseph O’Connor s’est autorisé quelques libertés. Tous les évènements du roman n’ont certes pas existé, mais le lien qui unissait le talentueux dramaturge et sa muse l’était, lui. Deux âmes qui se sont aimées à la mauvaise époque, dont l'union était impossibles. Comme le souligne Joseph O’Connor, la différence ne se limitait pas à l’âge. Lui, issu de la classe aristocratique, elle, d’un milieu pauvre. Leurs familles et leurs amis désapprouvaient cette liaison et, quelque part, on se demande si lui-même, John Millington Synge, n’avait pas un peu honte d’elle. Mais malgré tout il l’aimait. Sa sensualité prenait le pas sur ses manières irrévérencieuses lorsqu’il posait les yeux sur elle. Il avait besoin d’elle et elle de lui. Chacun à leur manière, ils ont nourri le génie de l’autre.
J’ai beaucoup aimé la manière dont est écrit ce roman. L’auteur lui-même prend une place dans le récit. Il est la petite voix qui pousse Molly Allgood à faire ressurgir les souvenirs qu'elle s’efforce de noyer dans l’alcool. Peu à peu, les souvenances refont surface sous forme de flashbacks. Le lecteur est alors transporté d’une Londres des années 1950 à un Dublin du début du siècle, lors de la relation entre la comédienne et le dramaturge. Le présent : une femme âgée, alcoolique, perdue et seule qui s’efforce de survivre, mettant un point d’honneur à se faire passer pour la personne qu’elle n’est plus. Le passé : une jeune femme pleine de vie, déterminée, talentueuse, par moment inconvenante mais indubitablement amoureuse. Ces deux époques se croisent, offrant un contraste sidérant, rendant ainsi l’histoire d’amour et l’héroïne d’autant plus touchante.
Joseph O’Connor fait revivre la relation licencieuse de deux artistes du début du XXe siècle à travers sa plume poétique et son imagination subtile, créant un roman vraiment exceptionnel. L’auteur a vraiment su capter et interpréter la déchéance d’une femme dont l’amour et la mort ont contribué à sa terrible descente aux enfers, offrant à ses lecteurs toute une gamme d’émotions différentes.
En conclusion, j’ai été complètement envoûtée par cette histoire d’amour émouvante et par la plume peu conventionnelle de cet auteur de talent. Un roman qui raconte une histoire aux racines avérées, dans une époque difficile, où les codes et les conventions avaient énormément de valeur et où les outrepasser était mal venu, mais où l’amour n’était pas si différent de ce qu’il est aujourd’hui : l’unique foi que nous ayons tous… A lire sans modération. Bonne lecture à tous.
_________________________________________________No good deed goes unpunished